Description
Moloch – Michaël Matthys
Michael Matthys a obtenu les autorisations nécessaires pour circuler dans l’usine dans l’usine de Cockerill Sambre, prendre des photos et en faire un bande dessinée. La visite commence. Et aussitôt s’affirme l’impossibilité de raconter une histoire, aussitôt la présence monumentale, vertigineuse et submergente du lieu lui vole la vedette.
Moloch est une représentation, une immersion, un exercice de mémoire et d’archive des hauts-fourneaux de la sidérurgie du bassin carolorégien, la région industrielle qui se trouve au sud-ouest de Bruxelles. La sidérurgie est, après le charbon, la seconde grande activité industrielle wallonne à subir les déboires de l’incessante révolution du capitalisme mondial.
C’est dans l’usine de Cockerill Sambre que nous entrons comme dans le labyrinthe du Minotaure, là où les hommes, travailleurs de la poussière, de la chaleur et de la limaille semblent être à la merci du monstre aux intestins de feu et d’acier.
Le jour se lève, sur le ring de Charleroi, la voiture de l’auteur quitte l’autoroute et emprunte le chemin de l’usine. Son guide l’attend. Michael Matthys a obtenu les autorisations nécessaires pour circuler dans l’usine, prendre des photos et en faire un bande dessinée. La visite commence.
Et aussitôt s’affirme l’impossibilité de raconter une histoire, aussitôt la présence monumentale, vertigineuse et submergente du lieu lui vole la vedette.
Il n’y aura donc que cette usine, ses machineries comme autant d’organes au travail, et ses quelques ouvriers que l’on croise comme des figurants d’un dispositif titanesque. Le narrateur se trouve perdu là comme un néophyte égaré dans quelque mystère d’Eleusis.
Le lecteur traverse l’espace, comme en apnée, la narration ne cesse de gagner en fluidité, la matière, elle, ne cesse d’exiger que l’on s’arrête. La narration joue le rôle de la machine quand la matière impose son regard critique. L’aspect photographique du dessin est démonté par le lent travail de l’acide qui attaque la plaque, la ronge d’une matière dense, moirée, sombre. Elle alourdit et ralentit par sa présence la lecture et la narration.
C’est de la taille-douce que provient cet étrange sentiment qui conduit nos pas dans ce dédale. C’est avec le cuivre que Matthys fait parler l’acier, c’est avec l’acide que se propage la lourde fumée, c’est avec la pointe du graveur que se dessine la précise et complexe mécanique de la grande machine.
Plongez comme le métal dans le perchlorure, entrez en fusion. Soyez rongés… Bienvenue à Moloch.
Des fenêtres de sa précédente demeure, Michael Matthys voyait les cheminées d’usines de Charleroi. Il leur trouvait une certaine beauté et il en a fait un livre. Ce carolorégien ravi par les usines s’est fait remarquer à l’académie de Tournai par des lithographies dans lesquelles il brossait une jungle charbonneuse, brumeuse comme son pays natal. Il vit à présent dans une riante vallée non loin de Thuin et de la Sambre, il fomente là quelque livre au sang de bœuf et continue d’attaquer à l’acide les plaques de cuivre qu’il marque de son empreinte indélébile.
Du même auteur aux éditions FRMK
Je suis un ange aussi — mai 2009
La Ville Rouge — mars 2009
100 pages — 21 × 26,5 cm
bichromie — couverture cartonnée
collection Amphigouri
ISBN 9782930204420